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Tchika et Les Petites Glo, deux médias qui savent parler aux filles…

Par Brigitte Valotto - Mise à jour le

féminisme ados

Mademoiselle Age Tendre, c’est du passé ! Aujourd’hui, la presse jeunesse n’explique plus aux adolescentes comment choisir leur premier blush ou embrasser leur premier crush, mais leur cause « empowerment au féminin » et produits « genrés »… Du moins, c’est le pari de deux rédactrices en chefs féministes, à la tête du magazine jeunesse Tchika et de la newsletter Les Petites Glo… Interview croisée.

Tchika, le magazine qui casse les stéréotypes de genre

Une petite fille se fait virer de son collège car son pantalon est trop court, une autre met au point une invention scientifique : l’actu est vue sous le prisme jeune et féministe dans Tchika, un trimestriel destiné aux filles de 7 à 12 ans, lancé il y a deux ans par une journaliste, Elisabeth Roman. Idem dans Tchikita, version « junior » du même magazine, pour les 4-7 ans, dont le troisième numéro sort ce mois-ci.

Trente-six pages reliées à l’actualité, toujours vue sous le prisme féministe, avec des sujets plutôt ambitieux et un parti pris d’écriture inclusive, peut-être pas évident à l’âge où on peine encore à assimiler la lecture. Ambition affichée : « déconstruire le rose et ses injonctions », à travers des portraits de gloires féminines, comme l’artiste Frida Khalo ou l’astronaute Claudie Haigneré. Mais aussi des jeux, des devinettes, des articles sur les sciences, la nature, les animaux – mais attention, dans Tchika, on parle de la reine lionne… et non pas de son compagnon !

Les Petites Glo, la première newsletter féministe (et culturelle) destinée aux adolescentes

La newsletter des « Petites Glo », bimensuelle et gratuite, s’adresse pour sa part aux plus grands – 12-25 ans. C’est la « petite sœur rebelle des Glorieuses », une newsletter féministe pour adultes créée par l’activiste Rebecca Amsellem en 2015, et qui rassemble aujourd’hui une communauté de plus de 150 000 personnes. Lancée il y a deux ans, les Petites Glo est envoyée gratuitement, deux fois par mois, par mail ou watsapp, et propose aux jeunes d’intéressants sujets de réflexion sur des sujets qui les touchent… « Peut-on être féministe et écouter Orelsan ? », par exemple.

L’originalité de cette news, qui se définit comme « résolument badass, infiniment impertinente », c’est son interactivité : les sujets s’inspirent beaucoup des échanges avec son lectorat, notamment via Instagram…. Comme Tchika ou Tchikita, Les Petites Glo se sont donné mission d’informer et divertir, certes, mais aussi de militer !

Tchika et Les Petites Glo sont des médias qui répondent aux aspirations idéalistes d’une génération… mais aussi de leurs rédactrices en chef, passionnées par leur sujet ! Chloé Thibaud, à la tête des Petites Glo et Elisabeth Roman, rédac chef de Tchika nous en parlent…

Comment est née l’idée de parler féminisme aux petites filles ou aux adolescentes?

Chloé Thibaud. Je suis rédactrice en chef des Petites Glo depuis janvier 2020, et ce n’est pas moi qui en ai eu l’idée. Mais ce qui m’a séduite et donné envie de prendre la relève pour l’écrire, c’est d’imaginer les contenus que j’aurais rêvé de lire quand j’étais ado. Notre ambition est d’avoir un ton décomplexé, de ne rien s’interdire, et de répondre aux différentes questions que les plus jeunes – filles et garçons – peuvent se poser.

Elizabeth Roman. J’étais rédactrice en chef d’un magazine scientifique, avec 60 % de garçons parmi les abonnés ! Donc, j’ai eu d’abord l’idée d’en créer un à l’intention des filles. Mais quand j’ai découvert ce qui était proposé aux filles, en général, dans les kiosques… j’ai décidé qu’au-delà des sciences, il manquait vraiment un magazine qui ne parle ni de mode ni de beauté…  mais de femmes puissantes !

Elisbeth Roman, rédactrice en chef des magazines jeunesse féministes Tchika et Tchikita

Et votre cible est-elle touchée par cet axe féministe  ?

Elisabeth Roman. Quand j’ai lancé Tchika il y a 2 ans, ça a immédiatement fonctionné, et c’est à la demande de beaucoup de parents que j’ai lancé la version « junior », pour les plus petites. Notre diffusion est confidentielle, nous sommes vendus seulement sur abonnement ou sur internet, en vente au numéro ; mais nous comptons 6000 abonnés sur les réseaux sociaux. Et beaucoup de réactions positives !

Chloé Thibaud. Nous avons 20 000 abonnés, et plus de 5 000 sur Instagram. Et je reçois régulièrement des messages d’ados, filles mais aussi garçons, qui me remercient d’aborder tel ou tel sujet, ou me demandent d’en parler – par exemple, Romy, 12 ans, m’a récemment écrit du Canada et je lui ai consacré une newsletter sur le thème de la bisexualité. Des parents nous contactent également, pour nous remercier de les tenir au courant de ce qui préoccupe leurs ados ! J’ai même déjà eu des mails d’un ou deux grands-pères !

Chloé Thibaut, rédactrice en chef de la newsletter féministe ados Les Petite Glo

Lire aussi : Les mots des combats féministes expliqués aux parents et aux grands-parents

Tchika et Les Petites Glo sont-ils des médias réservés aux filles, ou bien avez-vous aussi des lecteurs masculins ?

Chloé Thibaud. Non, au contraire, j’aimerais beaucoup qu’il y ait davantage de jeunes garçons qui lisent la newsletter Les Petites Glo, car je suis convaincue que nous devons avancer ensemble si nous voulons que les choses changent. Quand je lance des appels à témoins, je parviens parfois à avoir des garçons qui partagent leur expérience… Mais je pense qu’ils sont encore un peu frileux ! C’est lié à une éducation qui a trop longtemps conduit les garçons à ne pas se confier sur leurs émotions, leurs difficultés, leurs sentiments…

Elisabeth Roman. Au début, je voulais vraiment que Tchika soit perçu par les filles comme « leur » endroit privilégié… mais Tchikita, je l’ai ouvert d’emblée aux garçons. Le problème, c’est que les garçons ne lisent pas ! Sans doute parce que l’injonction de la lecture est plutôt faite aux filles : eux, on les incite à bouger ou à faire du sport.

Lire aussi : Comment donner une éducation féministe à ses garçons ?

Vous avez lancé un pavé dans la mare de la presse jeunesse destinée aux filles, quel est le regard que vous portez dessus actuellement… toujours rétrogrades, ou en voie de changement, peut-être grâce à vous ?

Elisabeth Roman. La presse pour jeunes filles, il n’y en a plus beaucoup dans les kiosques ! Les ados d’aujourd’hui préfèrent les réseaux sociaux. Mais ce qui reste a toujours ce côté girly, conseils mode beauté, stéréotypes de genre bien ancrés… Ils se sont un peu ouverts à des sujets plus féministes, mais ils n’ont pas l’angle que j’ai pris moi, c’est-à-dire, totalement engagé.

Chloé Thibaud. Oui, j’ai l’impression que la presse et l’édition en général ont entamé de vraies réflexions sur la question du féminisme, mais aussi du sexisme, de la grossophobie, du manque de diversité… Malgré tout, les clichés persistent, les efforts ne me semblent pas toujours suffisants. Côté jeunesse, j’ai tendance à trouver qu’on infantilise trop les ados. On ne leur parle pas concrètement d’éducation sexuelle, par exemple. Je crois, pour avoir échangé avec beaucoup de mes collègues, que nous leur avons donné une impulsion précieuse. Nous avons notamment publié plusieurs enquêtes qui ont été très relayées, sur le harcèlement dans l’espace public et les violences au sein du couple chez les jeunes. Cela démontre l’intérêt de ce travail, que je réalise main dans la main avec les ados qui veulent bien témoigner !

Les Petites Glo, version masterclass

On peut toujours s’inscrire à la première masterclass Les Petites Glo, lancée l’an dernier, sur le thème de l’activisme. Et une nouvelle saison sera à découvrir dans quelques semaines, sur une « belle idée » de thème, nous promet sa rédactrice en chef…

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