Que dit l’étude ?
Menée par l’institut TNS-Sofres dans le cadre d’une évaluation qualitative de la dernière campagne de sensibilisation à la protection du jeune public, ce rapport d’étude du CSA a révélé au printemps dernier que la télévision n’était plus regardée en famille. Les enfants et adolescents regardent de plus en plus la télévision seuls, les parents « vaquant à leurs occupations ». Ils accèdent ainsi librement à des contenus violents ou pornographiques, fournis par les plus grands, qu’il s’agissent du grand frère ou d’élèves des classes supérieures.
Pour les adolescents, la télévision est même devenue « un plaisir solitaire ». « Ils la regardent tout seuls dans leur chambre ou sur leur téléphone portable à la récré. Il s’agit pour eux d’un espace de liberté face aux contraintes que leur imposent la famille, l’école », précisait, à la présentation de l’étude, Françoise Laborde, présidente du groupe de travail sur la jeunesse et la protection des mineurs au CSA. Le Conseil pointe d’ailleurs que chez les garçons, regarder du porno s’assimile à un rituel de passage vers l’âge adulte.
Comment en est-on arrivé là ?
L’évolution des modes de vie, le travail des parents, l’éclatement des familles et bien sûr la multiplication des équipements TV à la maison : de nombreux enfants possèdent un téléviseur et un ordinateur dans leur chambre, échappant ainsi à la surveillance des adultes.
L’étude indique aussi que les enfants contournent le contrôle parental: très au fait des nouvelles technologies, certains s’en servent même pour empêcher les parents de vérifier le contenu des images qu’ils regardent !
Quels effets peuvent avoir des images choquantes ?
Certaines images peuvent engendrer des troubles comme la difficulté à s’endormir, les cauchemars, les angoisses, la banalisation de la violence ou encore l’agressivité. Chaque enfant communique différemment avec ses parents. Il est donc important de repérer les signes et de penser à faire le lien avec certaines images qu’il aurait pu voir.
Pourquoi les parents se sentent-ils dépassés ?
Selon l’étude, ils se sentent impuissants face à la complexité de la consommation TV par leurs enfants. En pratique, nombreux sont ceux qui ne savent pas s’il faut leur interdire ou pas de regarder la télé, s’il faut prévenir ou en parler.
Que faut-ils faire alors?
La seule réponse : l’éducation aux médias et le dialogue en famille. Même dédiées à la jeunesse, Gulli, Canal j ou Disney Channel ne sont pas des baby-sitters ! En tant que parents vous devez fixer des limites à ce que regardent vos enfants, les guider dans leurs choix. Et leur expliquer qu’à chaque âge correspond des programmes, et que l’image peut transmettre une vision fausse du monde dans lequel nous vivons. Qu’il faut donc bien distinguer la fiction de la réalité.
Ce discours est d’autant plus aisé à tenir que les enfants sont petits. Les adolescents sont plus difficiles à atteindre. Il faut donc trouver les bons arguments pour les inciter à changer de comportement.
Quelles sont les bonnes règles d’usage de la télévision ?
Avant trois ans : pas de télévision, même dans le cas d’émissions spécifiques. La télévision place le tout-petit enfant, qui a besoin d’agir pour se construire, dans une position passive qui peut nuire à son développement.
De 3 à 6 ans : le fait de regarder des émissions éducatives adaptées à son âge peut stimuler la mémoire ou aider à reconnaître les lettres de l’alphabet. Il vaut mieux privilégier des sessions courtes, et donner à l’enfant la possibilité de revoir plusieurs fois le même programme. Mais il faut rester vigilant sur ce que l’enfant regarde : il ne percevra pas la différence entre une publicité et un programme ou encore entre la fiction et la réalité, et pourra considérer comme réelles des images effrayantes qu’il aura vues.
De 6 à 10 ans : l’enfant est capable de faire le lien entre ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Il peut également vouloir montrer qu’il est capable d’imiter ce qu’il a vu. Il faut alors lui expliquer qu’il ne doit pas reproduire les situations vues à la télévision.
Jusqu’à huit ans, un enfant ne devrait regarder que des émissions pour la jeunesse. Le journal télévisé n’est, par exemple, pas adapté à sa sensibilité.
Entre 10 et 12 ans : l’enfant commence à accéder de manière plus autonome aux images et veut diversifier ses programmes en mixant programmes jeunesse et programmes tous publics, y compris ceux déconseillés pour son âge. Il faut donc l’accompagner dans le choix de ces programmes, et lui apprendre à devenir un téléspectateur actif.
Au-delà : l’adolescent croit pouvoir supporter certains contenus violents, même s’il n’en est pas émotionnellement capable. Il s’agit donc de maintenir le dialogue avec lui sur ce qu’il regarde ou écoute, de lui apprendre à choisir ce qui correspond à ses goûts et à sa sensibilité.
La signalétique du CSA est-elle vraiment efficace ?
Selon l’étude, les enfants comprennent en général le bien-fondé de la signalétique sauf pour les images pornographiques. « Ils ne voient pas le problème car pour eux ce n’est pas du porno mais la norme d’une relation sexuelle » s’est même alarmée Françoise Laborde. Pour autant, c’est aux parents d’appliquer, et au minimum de faire respecter chez eux, cette signalétique.
Précisons toutefois que la signalétique du CSA semble être assez souple, voire peu contraignante pour les diffuseurs. Certains programmes ou séries TV affichés moins de 10 ans ou moins de 12 ans et diffusés à heures de grande écoute, pourraient en effet bénéficier d’une vigilance accrue de la part du CSA.
De même, le CSA devrait jouer un rôle plus précis sur la question de l’éducation aux médias, en mettant à disposition sur son site internet des outils numériques et des informations moins succintes
Le CSA veut dialoguer avec les parents
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel veut accroître la protection des très jeunes téléspectateurs en mettant en place un espace de dialogue avec les parents sur son site Internet, jeunepublic.csa.fr. Celui-ci est ouvert depuis le 20 novembre et fait l’objet d’une campagne de promotion. Créé pour mieux protéger le jeune public dans ses contacts avec les médias audiovisuels, l’objectif est de «répondre aux questionnements des parents à l’aide de conseils simples et concrets». On y trouve notamment des conseils sur les contenus choquants, le contrôle parental et les programmes jeunesse.
A lire :
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