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Médecin légiste : « on s’occupe des morts, mais on aide aussi les vivants »

Par Bénédicte Flye Sainte Marie - Mise à jour le

médecin légiste

Praticien hospitalier au CH du Mans, le Docteur Stephan Jammart se consacre aussi depuis 2014 au métier de légiste au sein de l’Unité Médico-Judiciaire de cet établissement. En quoi consiste le métier de médecin légiste ? Il évoque pour nous les dessous de cette profession mise en lumière dans les séries TV, et souvent caricaturée.

Vous avez à la base une formation en médecine générale. Qu’est-ce qui vous a donné envie de bifurquer vers la médecine légale ?

Stephan Jammart : Quand on se lance dans le métier de médecin légiste, on pense à la thanatologie, aux autopsies. On veut contribuer à résoudre des enquêtes, à trouver des coupables et à épauler la justice. En passant ma capacité de légiste il y a neuf ans, j’ai réalisé qu’il y avait bien d’autres aspects que je n’avais pas envisagés, notamment tout le travail qui est effectué auprès des victimes d’agressions physiques et sexuelles. On s’occupe des morts mais on aide aussi les vivants.

En quoi consiste concrètement votre quotidien en tant que médecin légiste ?

Dans les petites structures, les UMJ  ( Unités médico-légales) comme celle dans laquelle j’évolue, on fait essentiellement de la victimologie, le plus souvent sur réquisition d’un enquêteur ou directement du procureur. On cherche notamment à voir si les blessures de ces personnes corroborent leurs déclarations. On effectue aussi des examens des gardés à vue, afin de vérifier que leur état physique et/ ou psychique est compatible avec le fait d’être mis en cellule pendant vingt-quatre heures. Parfois, les policiers nous sollicitent aussi avant la garde à vue, pour recenser d’éventuelles lésions et qu’on ne puisse pas les soupçonner de les avoir provoquées. Et lors d’une levée de corps, après un décès, si le médecin qui l’a constaté repère un ou plusieurs obstacles médico-légaux, on peut être appelé sur place pour décider de l’opportunité ou pas d’une autopsie. Nous sommes aussi sollicités dans tous les cas de morts violentes, notamment les homicides ou les accidents de travail. Dans les gros centres, les IML ( Instituts Médicaux-légaux), on fait exclusivement des autopsies

Stephan Jammart, médecin légiste à l’Unité Médico-Judiciaire du CH du Mans nous parle de son métier

Quelle idées reçues aimeriez-vous combattre sur le métier de légiste ?  

Justement le fait qu’on ne gère pas que les morts. On a beaucoup de responsabilités quand on suspecte des violences familiales et que cela peut aboutir, par exemple, au placement d’un enfant. Il faut essayer d’être juste, de bien s’entourer, de travailler main dans la main avec les assistantes sociales, les associations de victimes, les adresser à des psychologues, trouver des solutions à la fois médicales mais aussi sociales, notamment auprès des femmes confrontées à des violences conjugales qu’on ne peut pas renvoyer vivre avec leur agresseur. Ce qu’il faut savoir aussi, c’est qu’en étant médecin légiste, on peut se spécialiser dans une branche en particulier, comme la balistique, la toxicologie, la radiologie, l’entomologie ou l’anthropologie.

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Quelles sont, dans cet univers, les difficultés que vous rencontrez ?

Il y a un manque de personnel, qui n’est pas propre à la médecine légale mais est inhérent à la médecine toute entière. Il y a aussi des vraies inégalités territoriales. Et nous devrions bénéficier de davantage de soutien psychologique, sachant que nous sommes constamment confrontés à la souffrance et à la mort.

Qu’aimeriez-vous dire à celles et ceux qui pensent avoir cette vocation ?

Que le métier de médecin légiste est passionnant, mais qu’il faut être prêt à faire de longues études. Il faut donc se renseigner au maximum. Quand je lis certains livres ou vois certains films ou séries, je tique parce que c’est souvent très axé sur le sensationnel et cela ne reflète pas vraiment la réalité.

Quelles études pour devenir médecin légiste ?

Il y a désormais deux options :

  • la voie PASS (Parcours d’Accès Spécifique Santé), néo-première année de médecine qui se substitue à la PACES (Première Année Commune aux Études de Santé). C’est une licence santé avec une mineure dans un autre domaine (droit, éco-gestion, physique, biologie cellulaire, langues etc.).
  • la voie LAS (Licence Accès Santé), dans le secteur de son choix avec une mineure santé. On rejoint ensuite les filières MMOPK (Médecine, Maïeutique, Ondotologie, Pharmacie, Kinésithérapie) puis il faut suivre un cursus classique de médecine et se diriger vers la médecine légale et expertises médicales via un DES (diplôme d’études spécialisées). Cela implique au moins 10 ans d’études au total. A noter qu’avant 2017, la médecine légale était un diplôme complémentaire (DESC et capacité)

Quelles voies choisir au lycée ?

Aucune spécialité ne ferme en théorie la porte à la médecine légale mais mieux vaut privilégier les enseignements scientifiques.

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