Aux côtés de Ghislain Gérin, son compagnon depuis douze ans et son mari depuis quatre, Christophe Beaugrand, l’animateur de Ninja Warrior sur TF1 et des Matins LCI Week-end, a accueilli le 9 novembre 2019 un petit Valentin, né par GPA à Las Vegas. Un grand bonheur qu’il a beaucoup attendu et qu’il ne se lasse pas de savourer… Rencontre.
La GPA est un processus qui s’étale sur plusieurs années. Est-ce que ce temps long qu’il impose agit comme une grossesse durant laquelle l’on mature le parent que l’on deviendra ?
Christophe Beaugrand : Probablement, on a le temps de se préparer psychologiquement, alors que les gens chez qui tout ça se produit par hasard ne l’ont pas forcément. On mûrit sa parentalité. Du coup, au moment où l’enfant arrive, on est prêt. L’une de mes amies m’a dit avoir été très angoissée à la naissance de son bébé. Moi, ça n’a pas été du tout été le cas, les gestes me sont venus immédiatement, très naturellement. On parle d’instinct maternel, pas d’instinct paternel, pourtant, il existe !
Cela vous a-t-il amené à vous montrer plus sélectif dans les projets professionnels que vous acceptez ?
Christophe Beaugrand : Oui, j’ai appris à dire non. Ma priorité désormais, c’est d’être là. Alors, je refuse par exemple des télé-réalités qui m’obligeraient à tourner deux mois à l’étranger, parce qu’il est hors de question que je m’éloigne aussi longtemps de mon bébé. Dix ou quinze jours, comme je le fais pour Ninja Warrior, c’est le grand maximum. Mais paradoxalement, ça a ouvert la porte à d’autres projets, et m’a amené notamment à davantage me recentrer sur le journalisme que je ne le faisais avant.
Valentin vous rappelle-t-il le petit garçon que vous étiez ? A-t-il un tempérament très différent de ses papas ?
Christophe Beaugrand : Il a pris des deux ! C’est un gros dormeur comme Ghislain, et une pile électrique comme moi. Il fait des blagues et des bêtises, mais je préfère qu’il soit comme ça plutôt qu’amorphe !
Deux ans et demi, c’est l’âge de l’explosion de la parole. Votre fils vous étonne-t-il par ce qu’il exprime en ce moment ?
Christophe Beaugrand : Ce qui me fait marrer, c’est son imagination débordante. Il y a quelques jours, il me racontait qu’il y avait un petit monsieur avec un chapeau dans son placard. Et ce n’est pas Valentin qui avait peur de ce petit monsieur, mais le petit monsieur qui avait peur de Valentin. On a regardé récemment un épisode de Pat Patrouille ensemble, et il était très triste que les canards aient perdu leur eau…Il adore les monstres, les fantômes, et il me parle de ça sans arrêt. On a choisi qu’il nous dise à tous les deux Papa, contrairement à certaines familles homos où les parents prennent des noms différents. Quand Valentin nous appelle et que ce n’est pas le bon qui répond, il dit « non, Papa l’Autre » (rires)
Qu’avez-vous découvert de vous en devenant père, et qu’avez-vous découvert à propos de Ghislain ?
Christophe Beaugrand : Je fais un métier où l’on est très focalisé sur son nombril, et j’avais autrefois un petit côté drama queen. Depuis que Valentin est là, j’ai appris à relativiser. Et puis j’ai compris que la légende du good cop/ bad cop n’en était pas une. Clairement, je vois que l’autorité n’est pas de mon côté…
Justement, il y a souvent dans les couples l’un des parents qui est plus à cheval sur les principes. C’est donc Ghislain qui assume ce rôle ?
Christophe Beaugrand : On est sur la même longueur d’onde et nous sommes très accordés sur nos valeurs. On est d’accord sur le fond. Mais Ghislain est beaucoup plus carré que moi.
Le choix de médiatiser votre famille, est-ce que ça a aussi un but pédagogique ?
Christophe Beaugrand : Oui, complètement. Je suis présent sur les réseaux sociaux car je considère que c’est un outil d’engagement sociétal contre l’homophobie, qui peut aider à la tolérance. C’est en partageant les images de notre famille qu’on peut banaliser les choses. Ça vient compléter, dans ce domaine, l’action des associations. Beaucoup de familles homoparentales nous expliquent d’ailleurs que cela leur fait bien, que cela dédramatise, montre que nous sommes des parents comme les autres parents. J’utilise notre famille comme un symbole, notamment pour que les jeunes homos ne soient plus stigmatisés. C’est un message que j’ai envie d’adresser à leurs proches : non, ils ne sont pas anormaux ! Même si la société les accepte mieux qu’autrefois, ils sont toujours discriminés, et le suicide reste la première cause de mortalité chez les jeunes homosexuels…. En revanche, on ne montre jamais le visage de Valentin, parce qu’on ne voudrait pas qu’il ait l’impression plus tard qu’on lui a volé son image.
Lire aussi : Des livres pour parler d’homosexualité et d’homoparentalité aux enfants
Vous avez une très grosse communauté, entre autres sur Instagram et Facebook, et votre ouvrage, Fils à papa(s), s’est très bien vendu. N’est-ce pas le signe que les Français ont évolué sur la question des minorités sexuelles et des nouvelles parentalités ?
Christophe Beaugrand : Oui, je l’ai réalisé quand nous avons fait une tournée de dédicaces pour notre livre. On avait effectivement une petite partie de nos lectrices et lecteurs qui appartenaient à la communauté LGBT, mais surtout de très nombreuses familles hétérosexuelles qui nous racontaient leurs histoires, très intimes. Fils à papa(s) a permis de libérer la parole. Nous avons eu aussi des mamies qui venaient nous remercier, en nous confiant qu’elles avaient des enfants homo et que, grâce à nous, elles savaient qu’elles pourraient quand même devenir grands-mères.
Valentin a été inscrit sur votre livret de famille il y a seulement quelques semaines. Vous parait-il supportable qu’il soit toujours aussi difficile aujourd’hui d’effectuer ces démarches ?
Christophe Beaugrand : C’est une question qui est compliquée, comme l’est celle de la GPA. Grâce à la circulaire Taubira de 2013, on obtient tout de suite une carte d’identité pour notre enfant quand on revient sur le sol français. Pour le livret de famille, c’est beaucoup plus difficile. Il faut passer devant un juge français, et que celui-ci estime que la décision du juge américain est valable. Ce n’est pas très équitable, car ça dépend du bon vouloir du tribunal d’instance : à Paris, c’est 100 % de reconnaissance de filiation, dans les Yvelines, c’est 100 % de refus. Il faudrait qu’il y ait dans ce domaine une harmonisation pour que toutes les familles soient à égalité.
L’actualité de Christophe Beaugrand
Christophe Beaugrand nous donne rendez-vous chaque samedi et dimanche dans Les Matins LCI Week-end sur LCI. On le retrouve aussi régulièrement dans Les grosses têtes , émission présentée par Laurent Ruquier sur RTL et chaque année aux cotés de Denis Brogniart et Iris Mittenaere aux manettes de Ninja Warrior. Son livre Fils à papa(s), l’incroyable histoire de deux garçons qui voulaient devenir pères est sorti en novembre 2021 aux éditions Plon. Il soutient activement la fondation Le refuge qui prévient l’isolement et le suicide des jeunes LGBT.
Vous avez aimé cet article ou bien vous voulez réagir ?