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Infertilité : sensibiliser les jeunes générations aux risques pour leur fertilité

Par Juliette Prime - Mise à jour le

causes de l'infertilité

L’éducation à la sexualité à l’école enseigne comment ne pas tomber enceinte. Plus rarement à faire attention à sa fertilité. Résultat : peu d’adolescents savent que celle-ci décline avec l’âge, et que leurs modes de vie, l’environnement, ce qu’ils mangent, ont un impact direct sur leur capacité future à avoir des enfants. Mais faire attention à sa fertilité maintenant au cas où l’envie d’un bébé se présente un jour, une fois adulte, c’est mieux non ?

La génération Y n’a pas eu cette chance. Beaucoup se retrouvent aujourd’hui sans enfant ou avec des difficultés pour en avoir, car on les a laissés dans le noir sur ces sujets. C’est parce qu’ils n’ont pas reçu d’éducation à la fertilitéPourtant, il est essentiel de s’y intéresser. Après tout, il s’agit de leurs corps, c’est important de savoir comment il fonctionne, comment des éléments de son quotidien l’affectent ! Surtout que la fertilité est liée à cette partie de l’anatomie si intime, si complexe, et si changeante à l’adolescence…

Un infertilité grandissante chez les jeunes générations

Découvrir le sexe, l’amour, c’est important, pour faire des choix éclairés, consentis et se protéger. Mais découvrir le sexe comme appareil reproductif, c’est une autre façon de se protéger et de prévenir l’infertilité. Des milliers de produits chimiques affectent en effet la fertilité future de nos ados. Et la pollution environnementale rend infertiles de plus en plus de personnes dans le monde : une sur six selon l’OMS, 25 millions d’Européens en âge de procréer sur notre continent. « L’absence de contrôle sur ce type de substances n’est pas seulement néfaste pour la planète, mais aussi pour leur santé reproductive future ! » alerte le Docteur Francisco Dominguez de la Fondation IVI, l’un des centres d’IVI en Espagne consacré à la recherche sur la fertilité. 

Ce que les jeunes doivent savoir sur la fertilité

La fertilité, c’est la capacité à avoir un bébé. L’infertilité, c’est de ne pas avoir réussi à tomber enceinte au bout d’un an d’essai. Fertility Europe, organisation paneuropéenne de promotion de l’éducation à la fertilité, milite pour que ces connaissances deviennent des acquis chez les jeunes. 

Les femmes naissent avec un stock d’ovocytes (nos œufs ou cellules reproductives) présents dans les ovaires avant même leur naissance, et qu’elles perdent chaque mois au moment de l’ovulation. Ce stock diminue drastiquement à 35 ans, puis à 40 ans, jusqu’à disparaître complètement au moment de la ménopause. Les hommes produisent des spermatozoïdes toute leur vie, mais leur qualité diminue aussi avec l’âge à partir de 40 ans. Les polluants peuvent aggraver prématurément la qualité et la quantité des gamètes mâles comme femelles.

Il est urgent d’éduquer les jeunes à la fertilité

Ces savoirs sont aussi censés faire partie d’un socle commun, mais dans les faits, en moyenne, seuls 20 % des jeunes savent que la fertilité décline avec l’âge, et seulement 10 % que cela concerne aussi les spermatozoïdes des hommes. Ne pas savoir cela sur soi-même, c’est délétère !  C’est en lançant le jeu en ligne “ FActs ! 10 questions pour votre fertilité que Fertility Europe a mis en évidence ce manque de connaissances. D’ailleurs, pour tout découvrir à ce sujet, l’organisation invite nos 15-18 ans à y jouer. L’occasion de s’éduquer en s’amusant, tout en participant à une étude scientifique de dimension européenne sur le niveau de connaissance des jeunes sur la fertilité. 

éducation à la fertilité

Quels sont les risques qui pèsent sur la fertilité des jeunes générations ?

Fertility Europe veut informer les jeunes des risques qui pèsent sur leur fertilité future : certains aliments, trop ou pas assez de sport, l’obésité, l’anorexie, l’alcool, les drogues, les MST en sont, mais ce ne sont pas les seuls. 

Le professeur Dominguez de la Fondation IVI a mené une étude comparative sur des milliers de couples issus de deux populations différentes – en Espagne et aux États-Unis – pour savoir si leur exposition aux contaminants présents dans leurs environnements respectifs affectait leur capacité à avoir des enfants en parcours de Procréation Médicalement Assisté (PMA). Il a mis en évidence que les couples les moins exposés avaient plus de facilité à concevoir.  

Les perturbateurs endocriniens sont partout !

Ces perturbateurs endocriniens (PE) – polluants ayant la capacité de communiquer dans l’organisme humain – sont présents dans les cosmétiques, dans les ustensiles de cuisine antiadhésifs et jusque dans les protections hygiéniques ! Ce sont des glyphosates, des phtalates, des PFAS, du bisphénol (BPA), des métaux lourds… Ils entrent dans la composition de ces produits, des emballages alimentaires en plastique, des vêtements et  du maquillage, et affectent la fertilité humaine en modifiant les cycles menstruels, la qualité et la quantité des ovocytes et des spermatozoïdes, en avançant la ménopause. De l’arsenic dans le riz, des traces de strontium dans les céréales et les produits laitiers, du mercure dans le poisson, notre alimentation n’est pas épargnée. 

Ces substances chimiques perturbent le système hormonal à la base du fonctionnement des organes reproducteurs. « Elles pourraient être parmi les causes principales de la baisse de la fertilité humaine observée au cours des dernières décennies. Les conséquences sont bouleversantes : des chercheurs ont mis en évidence que le nombre de spermatozoïdes produit par les hommes aurait été divisé par deux en l’espace de 45 ans depuis 1973 ! » s’exclame le Docteur espagnol. 

Expulser les substances chimiques de nos modes de vie 

Mais pourquoi s’en protéger alors qu’on est au début de sa vie d’adulte ? Ces polluants sont en nous tous. On ne peut pas y échapper, ils sont partout. De plus, ils peuvent avoir un effet cumulatif : si on n’y prête pas attention, on peut y être exposé à des niveaux qui mettent en danger notre santé reproductive dans 10, 20, 30, 40 ans… Comment s’en protéger puisqu’on ne peut y échapper ?

Changer ses habitudes

Bonne nouvelle, d’abord, il faut faire en sorte de ne pas dépasser certains niveaux. « C’est difficile quand on est jeune, mais éviter d’utiliser trop de plastique, privilégier les contenus en verre, les matériaux recyclés, le bio, ne pas cuisiner avec des ustensiles en plastique, se passer du sèche-cheveux, sont des comportements à adopter qui peuvent vraiment faire la différence » conseille le Docteur Dominguez. En suivant ces stratégies d’évitement, on préserve sa fertilité en limitant son exposition aux substances néfastes présentes dans ces objets de la vie quotidienne. 

Réduire les effets des perturbateurs endocriniens, c’est possible !

Deuxième bonne nouvelle, on peut même compenser leurs effets dans l’organisme. Les travaux de la fondation IVI ont mis en évidence que certains composés environnementaux présents dans l’alimentation semblent avoir la capacité de réduire les effets de ces polluants : c’est le cas de l’acide folique dans les légumineuses, des acides gras de type oméga 3 et oméga 6 dans les poissons gras, les œufs et les noix notamment, des phytoœstrogènes dans certains céréales, fruits et légumes… Pour le plastique, difficile de s’en passer. Dans ce cas, on privilégie les plastiques labellisés « sans BPA ».

perturbateurs endocriniens fertilité

Trop jeunes pour se soucier de fertilité ? 

Ces produits chimiques, ce sont des microplastiques que l’on retrouve dans des échantillons de testicules humains, des premières règles qui arrivent à un âge précoce, des pathologies gynécologiques telles que le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), l’endométriose, et les myomes utérins. Ils peuvent empêcher de tomber enceinte plus tard, mener à des fausses couches, et être douloureuses et gênantes.

Mais si on ne veut pas d’enfant dans le futur ?

D’abord, les PE n’endommagent pas que la fertilité. Ils s’attaquent également au cerveau, à la santé cardiovasculaire. Ensuite, « On ne sait pas ce qu’on voudra plus tard. C’était mon cas, j’étais childfree (= sans enfant par choix). Ce n’est pas important jusqu’à ce que tu changes d’avis » témoigne Monika Bulmanska-Wingett, de Fertility Europe. « C’est bien de s’en tenir à ses choix. Mais c’est aussi important de maîtriser sa fertilité pour comprendre, au cas où, les challenges potentiels que tu devras affronter quand tu voudras fonder une famille dans le futur » ajoute cette responsable de la communication de  l’organisation. 

Pour des politiques publiques d’éducation à la fertilité 

« Notre collecte de données sur le niveau de connaissance des 15-18 ans sur la fertilité va faire l’objet d’un rapport que nous allons présenter au Parlement européen en mars 2025. Objectif : faire que l’éducation à la fertilité soit rendue obligatoire dans les cours d’éducation sexuelle des pays de l’Union européenne » explique Anita Fincham, porte-parole de Fertility Europe. « Les États ne le font pas, alors qu’ils se plaignent de la baisse de la natalité, c’est une aberration » se lamente-t-elle.

À défaut, elle recommande aux parents d’être open pour en parler aux enfants : de leur demander ce qu’ils pensent au sujet d’avoir des bébés, de leur dire de ne pas être embarrassés de ne pas avoir de connaissances sur la question. 

En France, Fertility Europe est représentée par le collectif BAMP, association de patients à la PMA et cheville ouvrière de la progression des droits reproductifs dans notre pays. Elle gère aussi des actions à destination des plus jeunes à travers INFO-FERTILITÉ. C’est un projet de mission d’information et de sensibilisation des 15-25 ans, des parents, des éducateurs et des professeurs axé sur ce sujet. 

Le collectif est également à l’initiative de Kama Lanta, organisé par son antenne montpelliéraine en Camargue. Un Koh-Lanta où l’on s’affronte pour remporter le totem de l’infertilité masculine, thème de cette journée de challenge et de solidarité à laquelle des jeunes ados (à partir de 13 ans) sont associés, et donnent tout pour cette cause à laquelle beaucoup se disent sensibles. Prochaine édition en 2025 ! 

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