Vous trouvez que votre enfant « écrit mal » ? Pas d’inquiétude pour autant si son écriture reste lisible… et s’il ne souffre pas ! L’apprentissage de l’écriture est en effet plus ou moins facile selon les enfants. Pour savoir s’il y a un réel problème et envisager une rééducation – possible à tout âge -, mieux vaut consulter un spécialiste. Décryptage avec la graphothérapeute Pascale Chavonnet.
Qu’est-ce, pour vous, « bien écrire » ?
Pascale Chavonnet : C’est avoir une écriture aisée et lisible, avec du mouvement et du rythme. Ce n’est pas une écriture calligraphique. Une écriture doit être spontanée et refléter la personnalité. Chacun peut avoir son style, différent du modèle proposé à l’école. A la préadolescence, vers 12-13 ans, les enfants ont d’ailleurs besoin de s’éloigner de ce modèle pour écrire plus vite. S’ils forment mal leurs lettres, il n’y a pas à s’inquiéter, c’est normal, dans la mesure où leur écriture reste lisible. Plus tard, à l’adolescence, certains vont par exemple faire leurs « f » en forme d’hélice. L’écriture en script n’est pas une difficulté supplémentaire car elle n’empêche pas forcément d’aller aussi vite.
Quelles sont les phases d’apprentissage de l’écriture ?
Pascale Chavonnet : L’écriture résulte d’un apprentissage complexe. La phase pré-calligraphique, de 6 à 7 ans, marque son début. Elle se caractérise par un manque de maîtrise du geste. Puis vient la phase calligraphique, de 10 à 12 ans, au cours de laquelle le modèle scolaire est reproduit plus ou moins fidèlement. Enfin, au collège (ou avant pour certains enfants), vient la phase post- calligraphique, pendant laquelle l’enfant aménage son écriture, la personnalise et continue à accélérer sa vitesse.
Quand y a-t-il un problème ?
Pascale Chavonnet : Quand l’écriture de l’enfant est altérée dans son aisance, sa lisibilité et/ou sa rapidité. Il s’agit de dysgraphie (NDLR : on parle de dysgraphie lorsque la qualité de l’écriture est déficiente dans son aisance, sa clarté et/ ou sa vitesse alors qu’aucun déficit neurologique ou intellectuel ne l’explique). L’écriture peut aussi occasionner une fatigue excessive et des douleurs que les enfants ne signalent pas toujours parce qu’ils les croient naturelles. Il est important de traiter la dysgraphie car elle peut avoir des répercussions importantes. Outre le fait qu’il n’est pas lisible, l’enfant à qui on répète que son écriture est vilaine, qui se voit retirer des points parce qu’il écrit mal, perd peu à peu confiance en lui et encourt le risque d’entrer dans une spirale d’échec scolaire. Des blocages peuvent se manifester dès la maternelle : certains enfants ne veulent ni lire ni dessiner et ils prennent de ce fait beaucoup de retard.
Comment remédie-t-on à ce trouble ?
Pascale Chavonnet : Le rôle du graphothérapeute consiste à rééduquer l’écriture avec des exercices qui vont faciliter l’aisance du geste. Pour obtenir ce résultat j’utilise la peinture, le sable, la pâte à modeler, ou encore la musique pour le rythme. Mais ma première action est de redonner à l’enfant confiance par rapport à ce qu’il est capable de produire, en lui montrant que son écriture a certains atouts, et qu’il écrit de façon inégale et peu aisée sans le faire exprès. L’effet est immédiat ! Lorsque je reçois un enfant en consultation je commence par établir un bilan graphomoteur qui consiste à effectuer par exemple un examen de la motricité graphique (observation de la position du corps, de la tenue du stylo), un contrôle de la bonne acquisition des signes de base du graphisme, un examen de l’écriture permettant d’indiquer si l’écriture de l’enfant est en rapport avec celle de son âge et de sa classe, un test de vitesse… Ce bilan est assorti de préconisations. Le nombre de séances se situe entre 10 et 30. Pour les enfants en maternelle, quatre séances peuvent suffire.
Que peuvent faire les parents ?
Pascale Chavonnet : Ils peuvent observer d’éventuels décalages par rapport au niveau de la classe, à celui des copains ou des frères et sœurs du même sexe (le niveau de maturité est différent entre garçons et filles). Ils peuvent aussi prendre en compte les remarques répétées des enseignants, du type « applique-toi », « illisible »… et ne pas hésiter à demander à leur enfant s’il éprouve des douleurs en écrivant. En revanche, il est inutile de lui demander de s’appliquer, car il ne fait pas exprès d’écrire mal ! Les pages d’écriture sont aussi à proscrire car elles accentuent les crispations du geste et donc la douleur. Les parents peuvent aussi donner à l’enfant l’idée d’essayer différents outils scripteurs. En effet, s’il appuie trop, le stylo-plume peut favoriser un appui plus léger. A l’inverse, le stylo-bille peut l’aider à mieux écrire. Les stylos avec des guide-doigts sont aussi intéressants car ils contribuent à la bonne tenue du stylo (le pouce face à l’index, le stylo tenant le majeur à l’arrière).
(Cet entretien, réalisé par Catherine Lengellé, a été publié une première fois dans « Graines d’écriture »).
Pour en savoir plus sur la graphothérapie et la dysgraphie : www.graphotherapeute.fr
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