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Comment faire le deuil d’un frère ou d’une soeur ?

Par Milla Di Gregorio - Mise à jour le

faire le deuil d'un frère ou d'une soeur

« Tous les bonheurs se ressemblent, mais chaque infortune a sa physionomie particulière » écrivait Tolstoï dans son livre Anna Karénine, et il est vrai que chacun d’entre nous vit les moments difficiles de sa vie différemment. Nos réactions face à la douleur émotionnelle sont les fruits de notre propre histoire, de notre éducation, de notre niveau émotionnel et aussi de notre perception du monde et de la nature. La perte d’une personne proche est un évènement très triste. Si cette personne fait partie de notre famille, le deuil, qui est un processus normal, est encore plus difficile à surmonter. Si la personne décédée est celle avec qui nous avons grandi – notre sœur ou notre frère – une vraie partie de nous s’en va avec elle.

Si la perte d’une enfant est la pire des choses qui puisse arriver à un parent, la souffrance d’un enfant ou d’un ado lors du décès d’un frère ou d’une soeur ne doit pas être sous-estimée. Alors comment aider son enfant à faire le deuil de son frère ou de sa soeur ?

Quelles sont les étapes du deuil ?

Le deuil est le processus psychologique consécutif à la perte définitive d’un être cher, qui entraine des réactions physiologiques et psychiques. La notion de deuil a été introduite en 1917 par le célèbre psychanalyste Sigmund Freud dans son ouvrage Deuil et mélancolie. Il y décrivait le deuil comme une réaction à la mort d’une personne, mais aussi à un sentiment de perte (séparation amoureuse, perte d’emploi ou d’un objet). La période du deuil est souvent composée de plusieurs étapes décrites par la psychiatre Suisse Elisabeth Kübler-Ross :

Choc ou déni

« Ce n’est pas possible, c’est une erreur ! ». Cette première réaction suite l’annonce de la mort d’un être cher provoque un certain détachement de la réalité. On se renferme sur soi-même et on se refuse à croire que le pire c’est produit, on peut même continuer à faire des projets avec la personne décédée. Cette étape nous permet d’organiser et assister aux obsèques encore triste mais « anesthésiés », grâce à des hormones tranquillisantes produites dans notre corps à ce moment précis.

Colère

« Pourquoi lui/elle ? C’est injuste ! ». En même temps que de la culpabilité, on ressent une colère vive face à la vie, aux circonstances, à la personne décédée qui nous a laissé seul.e et qui est « partie », parfois aussi face au personnel médical.

Marchandage

« Je ferais tout pour qu’il/elle revienne. ». Nous sommes prêts à tout pour faire revenir à la vie l’être cher décédé. Nous avons envie de vivre comme « avant », ressentant un sentiment de culpabilité dans ce qui a conduit à la mort de la personne aimée.

Tristesse ou dépression

« Je ne trouve plus de sens à la vie, tout est fini et c’est si triste. ». On finit par se rendre compte que la personne décédée ne reviendra plus jamais, que les rêves et les projets communs ne se réaliseront jamais. Si la tristesse est trop profonde ou longue, elle pourrait se transformer en dépression.

Acceptation

« J’ai compris, il/elle ne reviendra plus, je dois continuer à vivre ». Nous sommes résignés à cette nouvelle réalité et avons fait le deuil de notre vie d’avant avec la personne décédée. On recommence à vivre en faisant des projets, en retrouvant le bonheur auprès de nos proches, sans oublier pour autant la personne partie définitivement, mais en acceptant la situation avec une douleur moins vive.

La perte de son frère ou sa sœur : une épreuve difficile

Peu importe la relation qu’un frère ou une sœur ont pu avoir ensemble, ils ont grandi en même temps. La différence d’âge entre frère et sœur est rarement très importante (plus de 10 ans) et ils découvrent la vie ensemble, et à peu près en même temps. Les jeux, les amis, la vie à l’école, les sorties, les différents évènements comme les anniversaires… une fratrie partage beaucoup de choses qui créent des liens forts. Notre frère ou notre sœur font partie de nous-même (et encore plus les jumeaux), nous avons été accueillis dans le même ventre, notre mère nous a laissé à tous deux ses empreintes biologiques.

Lire aussi : Comment expliquer la mort à un enfant ?

Maladie ou accident, se confronter aux émotions

La mort, en particulier si elle concerne des enfants ou des adolescents, est le plus souvent due à la maladie ou à un accident. Dans le cas d’un frère ou d’une soeur souffrant d’une maladie grave, l’enfant ou l’ado dispose d’un certain temps pour l’accompagner et se préparer à ce qu’il ou elle le quitte définitivement un jour prochain. Ils peuvent revivre ou se remémorer des souvenirs communs, évoquer l’avenir, le souhait du jeune malade de réaliser l’un de ses rêves, le désir de « tout » se dire.

A l’inverse, un décès accidentel enlève soudainement la possibilité de parler avec son frère ou sa sœur, et rapidement, c’est la colère qui submerge l’enfant ou l’ado, car il reste tellement de non-dits et de moments ensemble non vécus.

Comment gérer le deuil pendant l’enfance ou l’adolescence

Quand nous sommes enfant, la perception de la mort est souvent assez imaginaire, et parfois avec beaucoup de questions sans réponses de la part de nos parents et proches, qui ne veulent pas « nous faire souffrir ». A l’adolescence, avec tous les changements physiques et psychiques qui accompagnent cette étape de notre vie, le concept de la mort et de la vie après la mort est propre à chacun.

Si on perd un frère ou une sœur pendant son enfance, on perd un complice dans les « bêtises », un copain de jeux, un ami pour regarder des dessins animés, la personne qui nous comprend souvent le mieux. L’enfant ressentira alors plutôt de la tristesse que de la colère.

Quand la perte de son frère ou de sa soeur survient pendant l’adolescence, le vécu ensemble inclut des joies et des secrets, le premier amour, la recherche et la découverte de soi, les questions sur la nature et le monde. Cette période de la vie, caractérisée avec un surplus d’hormones, mène l’adolescent à ressentir de la tristesse, mais aussi beaucoup de colère . Restez attentifs et veillez à ce que l’adolescent en deuil ne soulage son chagrin dans l’isolement ou dans l’alcool, les médicaments ou les drogues.

Lire aussi : Faire le deuil d’un parent avec qui on a coupé les ponts

Les étapes pour aider les enfants et les ados à faire leur deuil et se reconstruire

  • Assister aux obsèques de son frère ou de sa soeur, ou si ce n’est pas possible pour quelque raison que ce soit (distance, âge trop jeune, son propre choix), mettre en place une représentation ou un rituel qui marque cet évènement triste. Matérialiser ses pensées en brulant une bougie, faire une cérémonie, se ressembler en famille, garder quelques vêtements de la personne décédée, commémorer les dates d’anniversaire du décès, par exemple, aide à concrétiser l’absence, et « faire » quelque chose en mémoire du défunt apporte un certain réconfort.
  • Etre présent pour ses parents, comme ils le sont pour le reste de la fratrie, développe l’empathie et le soutien, et aide à faire le deuil ensemble.
  • S’autoriser à extérioriser ses émotions, surtout avec les personnes les plus proches, ses parents, grands-parents, oncles et tantes…
  • Exprimer sa douleur, mettre des mots sur ses sentiments et ses émotions, et prendre en compte ce qu’ils provoquent chez l’enfant ou l’ado.
  • La tristesse peut aussi s’exprimer à travers l’écriture (pourquoi ne pas écrire à son frère ou sa soeur disparu ?), le dessin, la danse, la musique, le chant…
  • Remercier les personnes qui ont été présentes aux obsèques.
  • Communiquer avec sa famille, ses amis, rencontrer de nouvelles personnes, mais aussi se garder des moments pour soi, sans toutefois plonger dans la solitude et l’isolement.
  • S’autoriser à demander de l’aide à un psychothérapeute pour un accompagnement régulier si nécessaire.

Il est difficile de mettre des mots sur un évènement qui se concrétise par l’absence durable de ce frère ou de cette soeur, mais qui laisse aussi la place à beaucoup d’interrogations. En essayant de « protéger » et de cacher une partie des étapes décès-obsèques-deuil, avec bien entendu de bonnes intentions, les parents empêchent en fait l’enfant ou l’ado de faire son deuil correctement. L’absence d’un frère ou d’une soeur se fera ressentir tout au long de sa vie.

La douleur suite au décès d’un proche n’est pas qu’émotionnelle, elle est aussi physique – elle se traduit par une élévation du rythme cardiaque, des problèmes digestifs, des insomnies et d’autres symptômes physiologiques. Alors soyez vigilants quant aux réactions de vos enfants après le décès de leur frère ou de leur soeur et veillez à leur bien-être autant moral que physique.

Liens et structures de soutien psychologique : www.filsantejeunes.com (informations et soutien aussi pour beaucoup d’autres sujets importants qui concernent les jeunes)

Milla Di Gregorio – Psychopraticienne

Milla est spécialisée en parentalité, adoption et traumatismes psychologiques. Formatrice et conférencière, elle reçoit des adultes, adolescents, parents et futurs parents.

www.milladigregorio.com
tél. 07 71 57 47 74
milladigregorio@outlook.com
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