Georges Brassens aurait eu cent ans cette année, mais ses chansons n’ont pas pris une ride : partez à la découverte de Sète en famille avec un guide malicieux et moustachu que les enfants vont adorer… Brassens lui-même !
Les célébrations de son anniversaire sont une bonne occasion de reprendre une petite lampée de ciel et de mer bleus cet automne : Georges Brassens est né en octobre 1921 à Sète, et sa ville natale a prévu des événements, expositions et concerts jusqu’en décembre à l’occasion du centenaire de sa naissance. Point de ralliement des commémorations : un bateau phare flambant rouge, accosté quai du Maroc et offrant une belle vue panoramique sur le port. Un point de départ parfait, donc, pour un premier aperçu de la ville et une balade sur les traces de l’artiste… en chansons, bien sûr !
« J’ai rendez-vous avec vous »… au Roquerols
Baptisé du nom d’un petit îlot équipé d’un phare où Brassens aimait à aller se baigner, le bateau phare inauguré pour les commémorations du centenaire Brassens se veut lieu de vie, plus que d’hommage – respectant en ceci la simplicité dont ne se départit jamais l’artiste libertaire. Ici, dans un espace joliment réinventé, façon décor de ciné, et surmonté d’un phare de douze mètres, vous pourrez présenter le chanteur à vos enfants : la fausse facilité de ses ritournelles, ses vers souvent irrévérencieux et cocasses, continuent à séduire instantanément les jeunes oreilles ; tandis que le personnage hors normes, plus attaché à sa liberté qu’à sa gloire et « d’une pudeur quasiment maladive » comme il l’avouait en chanson, n’a pas de mal à surprendre cette génération gavée d’images bling bling, de racontars « people » et de gloires de téléréalité !
« C’est un modeste… »
On se rend bien compte de la personnalité iconoclaste et modeste de Brassens à travers les films projetés, on peut appréhender sa vie à travers les photos, les manuscrits, écouter des textes et chansons réinterprétés dans des spectacles très variés (programme à consulter sur le site dédié. – Accès au Roquerols du mercredi au dimanche en journée de 10 à 19h, les lundi et mardi seulement en soirée, quand un spectacle est prévu.)
Les plus jeunes sont invités à construire leur propre guitare avec des bois de récupération (Ateliers « Je me suis fait tout petit » tous les mercredis, en collaboration avec l’école des Beaux-Arts de Sète, 6€). Ils pourront aussi participer avec les parents à un « Escape Game » sur le bateau, à la recherche de la moustache de Georges (scénographie grandeur nature, en collaboration avec le Game Lab de Sète, 5€, billetterie au bateau) !
« Maman, papa »… dans la rue qui porte leur nom
On peut les voir en photos et en film, sur le bateau : les parents de Brassens étaient un couple franco-italien d’origine modeste, aux personnalités hautes en couleurs. Il leur était très attaché, et leur rendit hommage avec la jolie chanson « Maman, papa ». Fredonnez-là tout en grimpant dans les ruelles étroites du quartier de pêcheurs, resté très populaire, où il vit le jour. Depuis, la rue a pris son nom – qu’en penserait-il, lui qui raille, dans les couplets de « Jeanne Martin », les « édiles » qui avaient rebaptisé Cette – ville portant alors le « nom d’un adjectif démonstratif » – en Sète ; puis les « anciens combattants » qui avaient exigé de renommer sa « chère vieille rue » de l’Hospice en rue «Henri Barbusse » ?
Aujourd’hui, c’est donc la rue Georges Brassens ! Et c’est le point numéro un du parcours « Du petit Georges au grand Brassens », proposé par l’Office du Tourisme – à télécharger gratuitement sur leur site. Près de la maison, une immense fresque est dédiée à Brassens par le graffeur Maye en 2019. Tout au long des ruelles qui grimpent du port vers le mont Saint-Clair, vous verrez beaucoup de Street Art – il existe aussi un parcours dédié. Quant à la maison de Brassens elle-même, elle ne se visite pas, mais si vous voulez en apprendre davantage, vous pouvez choisir de suivre un guide, tous les vendredis à 10 heures (Adultes plein tarif, 7,50€, enfants 6-12 ans, 3 €, pass famille 2 adultes + 2 enfants 18€, comprenant l’accès journée au bateau Le Roquerols…)
« Le mauvais sujet »… du lycée au musée !
N’en doutez pas : Sète est une ville qui monte ! Dans tous les sens du terme, comme vous pourrez vous en rendre compte en continuant sur le parcours (il dure environ 1h30, avec un bon dénivelé !) Faites une entorse à l’ordre suggéré : après la maison natale, pourquoi ne pas poursuivre l’ascension vers le lycée Paul Valéry (point 4), ancien collège de garçons où le futur chanteur fit des siennes – comme il l’évoque dans de nombreuses chansons, comme le « Mauvais sujet repenti » et les « Quatre Bacheliers », dans laquelle il rend hommage à l’attitude de son père suite au petit cambriolage avec lequel il faillit mal tourner : un épisode qui plaît aux jeunes !
Près du lycée, une autre belle fresque et une vue plongeante sur ce quartier de pêcheurs tout en ruelles étroites débouchant sur la Grande Bleue, où s’installèrent nombre d’immigrés italiens au siècle dernier – dont la mère de Brassens, Elvira, d’origine napolitaine. Du lycée, vous pouvez encore grimper (en sortant du parcours suggéré) jusqu’au Musée Paul Valéry, autre célébrité de cette petite ville qui a décidément vu naître bien des talents – le metteur en scène Jean Vilar, la cinéaste Agnès Varda, les peintres Combas, Di Rosa, Soulages… Parmi tous ces artistes, l’un d’eux eut une influence certaine sur le futur chanteur : le poète, bien sûr. A faire découvrir lui aussi aux enfants, grâce au Musée Paul Valéry qui domine, sur le Mont Saint-Clair, le vieux port et le cap de Sète.
Prenez votre souffle : il vous manquera d’autant plus au terme de l’ascension en découvrant cette vue superbe ! Outre sa beauté, elle permet aussi de mieux comprendre la topographie de l’ « île singulière », sillonnée de canaux qui relient l’étang de Thau à la mer Méditerranée. A admirer aussi du haut d’un autre phare, celui du Môle Saint-Louis (visite libre 3,50€, gratuit jusqu’à 11 ans, avec une surprise pour les enfants au sommet!)
« Les copains… d’abord » : on retrouve la bande
Redescendez des hauteurs pour retrouver la bande à Brassens sur les quais qui longent les canaux (points 6 et 7 du parcours). Lorsque l’artiste se mit en caracoler en tête des ventes et devint un homme riche, il n’acheta pas une villa avec piscine, ni un yacht, bien évidemment… Mais un modeste pied à terre dans sa ville natale de Sète (numéro 5 du quai Adolphe Merle, qui borde le canal royal) et une « coquille de noix » amarrée devant, avec laquelle il amenait les amis d’enfance sur l’étang de Thau.
Tous bons vivants, on les voit manger, boire et rigoler entre deux plongeons, dans les petits films que le chanteur tournait avec sa caméra super 8. Et ce petit bateau qui les amenait se baigner attrapa dans ses filets une bien belle chanson, indémodable, que tout le monde, petits et grands, adore reprendre – vous en aurez sans doute l’occasion, car les succès du chanteur planent sur sa ville, et se font souvent entendre au coin des rues !
Non loin des quais, ne manquez pas le joli théâtre Molière, récemment restauré, dans lequel Brassens se produisit sept fois. Et si vous êtes fatigués par votre ascension du Mont Saint-Clair, faites comme Georges : sillonnez les canaux et l’étang de Thau en bateau : plusieurs balades sont possibles, et notamment une croisière commentée de 45 minutes (Canauxrama, 11€, tarif enfants 6-12 ans 6€ ). Prévoyez une halte à la « Pointe Courte » (point 5 du parcours) qui ouvre sur l’étang du Thau : cet autre quartier de pêcheurs très pittoresque, immortalisé par Agnès Varda en 1955, était l’un des « spots » favoris de l’interprète du Gorille !
La plage où il « passe sa mort en vacances »…
Avec la douceur du sud, même en octobre, les enfants pourraient bien avoir envie de se baigner ! Un détour par la plage s’impose, mais pas n’importe quelle plage : allez à la plage de la Corniche, celle sur laquelle Brassens suppliait d’être enterré (point 9 du parcours). Vous passerez par le « Bois de Mon Coeur » dont il fit des refrains (point numéro 8 du parcours, un espace a été reboisé et rebaptisé ainsi en hommage à la chanson.) Et vous retrouverez certains vers de sa « Supplique pour être enterré sur la plage de Sète », gravés sur une stèle de granit face à la mer (point 10).
Les plus petits adoreront sans doute le « Fantasy Park » (structures gonflables) qui anime aujourd’hui « cette grève où le sable est si fin »… mais vous aurez sans doute du mal à y trouver la sérénité autrefois ressentie par le poète qui voulait y « passer sa mort en vacances » ! Mieux vaut peut-être que son vœu n’ait pas été exaucé : pour trouver la « tombe en sandwich entre le ciel et l’eau » dont il rêvait, il vous faudra remonter (encore!) la corniche et trouver le tombeau familial dans le cimetière Le Py, autrefois « cimetière des pauvres »… (point 11) Une dernière demeure forcément… modeste !
Vous trouverez tout près un espace muséographique interactif qui complétera à merveille votre pélerinage – là encore, c’est Brassens lui-même qui vous guide ! Sa voix vous accompagne en effet à travers un parcours articulé autour de sa vie et de son œuvre (Espace Georges Brassens, parcours thématiques dont un dédié aux moins de 6 ans) De quoi repartir de Sète… des chansons plein la tête !
Sète, une étape gastronomique…
Sur le Roquerols, on peut boire un verre au bar – très années 50 – et déguster les plats préférés de Brassens sur des nappes à carreaux rouge et blanc… comme chez l’ami Lolo où Georges se réfugiait souvent, bien loin des trompettes de sa renommée ! Le lieu est très joli et l’assiette est bonne : une bonne occasion de goûter à l’excellente gastronomie locale, très inspirée par la mer et les influences italiennes. Ainsi, la tielle qu’on peut acheter dans toutes les poissonneries de la ville (celle de René Dassé, l’un des traiteurs les plus réputés, a même sa vitrine sur le port) est une tourte en pâte à pizza, garnie d’un ragoût de poulpe épicé, que dégustaient traditionnellement les pêcheurs italiens du quartier haut. Et la macaronade, plat préféré de Georges, est un délicieux mélange de macaroni et de viande mijotée. Sur le bateau, vous pourrez aussi goûter la recette inédite des cannelloni d’Elvira, la mère italienne du chanteur, mitonnés par Pierre Vedel, ami de Brassens et chef étoilé.
Sur l’étang de Thau, vous pouvez également déguster, directement chez les pêcheurs, les fameuses huîtres de Bouzigues. Et sur le port, vous trouverez les terrasses de nombreux restaurants de poisson. Une institution : le restaurant Le Rio (7 quai Léopold Suquet) qui propose une version « bistronomique » des plats du chef étoilé Fabien Fage, qu’on peut retrouver aux Halles de Sète (à consommer sur place ou à emporter) et de façon plus classique, dans son restaurant « The Marcel ». En plus de vous régaler avec des spécialités revisitées, Le Rio reste bien dans l’esprit « Music Hall » de votre balade : c’est un ancien cinéma des années 50, reconverti en restaurant mais aussi en lieu de culture, d’expos et de concerts, dont la belle déco fifties n’aurait pas dépaysé Georges !
A vos agendas : 22 v’la Georges !
Fin octobre, vous pourrez assister à Sète à « 22 v’la Georges ! », une fête joyeuse, populaire et entièrement gratuite, qui a lieu chaque année à la date anniversaire de la naissance du chanteur : à cette occasion, plus de cent artistes reprennent ses chansons, dans diverses langues et styles musicaux, un peu partout dans Sète !
Pour préparer votre visite, plus d’informations sur le site de l’Office de tourisme de Sète
Crédits photo mise en avant : Rodolphe Barrat
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Super article sœurette ! Ça donne envie de traîner à Sète/Cette sur les pas de Georges, jusqu’à la plage de la Cor-ni-cheu !